Fiscalité 2026 : le Nigéria taxe le travail du sexe

Le Nigéria franchit un cap inédit : à partir de janvier 2026, les revenus issus du travail du sexe seront…

Le Nigéria impose la taxation des revenus du travail du sexe dès janvier 2026. Une réforme fiscale inédite qui cible les secteurs informels et relance le débat sur l'inclusion, la légalité et la protection sociale.

Le Nigéria franchit un cap inédit : à partir de janvier 2026, les revenus issus du travail du sexe seront soumis à l’impôt. Une réforme controversée qui élargit l’assiette fiscale aux secteurs informels, tout en soulevant des débats éthiques sur la reconnaissance économique et la criminalisation persistante.

 

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Lagos, 6 octobre 2025 – Le gouvernement nigérian franchit une étape novatrice en matière de politique fiscale, en imposant la déclaration et la taxation des revenus issus du travail du sexe à compter du 1ᵉʳ janvier 2026. Taiwo Oyedele, président du Comité présidentiel sur la politique et les réformes fiscales, a annoncé cette mesure lors d’une session de sensibilisation tenue à Lagos. Celle-ci s’inscrit dans une vaste refonte des lois fiscales visant à élargir l’assiette imposable sans distinction d’activité professionnelle. Il a affirmé que l’État doit imposer tout revenu, quelle que soit la nature du service fourni, et a souligné que les nouvelles dispositions n’excluent aucun secteur informel, y compris les « runs girls » ou travailleuses du sexe.

 

Un élargissement de l’assiette imposable pour tous les secteurs

 

Cette initiative repose sur le principe fondamental d’une fiscalité inclusive, où tous les gains monétaires générés sur le territoire national sont assujettis à l’impôt, à l’instar des professions formelles comme le commerce ou les services numériques. Les autorités précisent que cette mesure ne saurait légaliser la prostitution, qui demeure illégale au Nigéria, mais cible uniquement les revenus afin qu’ils contribuent au budget de l’État.

Par ailleurs, cette taxation s’applique également à d’autres acteurs informels, tels que les influenceurs sur les réseaux sociaux ou les collecteurs de déchets (« agberos »), illustrant une volonté de rationaliser le système fiscal dans un pays où l’économie informelle représente une part substantielle du PIB.

Un rapport de 2024 met en lumière l’ampleur économique de ce secteur : à Lagos seulement, les dépenses liées aux relations sexuelles transactionnelles ont atteint environ 661 milliards de nairas, dont près de la moitié a directement bénéficié aux travailleuses du sexe. Ces fonds servent souvent à soutenir des familles, à financer l’éducation des enfants ou à couvrir des frais médicaux, dans un contexte de chômage élevé et de pauvreté touchant particulièrement les femmes. De ce fait, cette activité constitue pour de nombreuses Nigérianes un moyen de survie économique face à des opportunités limitées.

 

Implications sociales et éthiques d’une mesure controversée

 

Au-delà de son volet strictement fiscal, cette réforme soulève des débats profonds sur les plans social et moral. Des défenseurs des droits des travailleuses du sexe y voient une reconnaissance implicite de leur contribution à l’économie, ce qui pourrait potentiellement ouvrir la voie à une meilleure visibilité et à une protection accrue contre les abus et l’exclusion. Cependant, elle interroge l’hypocrisie perçue d’un État qui criminalise la prostitution tout en la taxant, comme l’illustre l’ironie soulevée par certains observateurs : « On peut aller en prison pour prostitution le matin et recevoir un avis d’imposition l’après-midi. »

Le public réagit de manière contrastée : certains saluent cette mesure comme équitable pour combler les déficits budgétaires, tandis que d’autres la dénoncent comme hypocrite ou stigmatisante, et craignent qu’elle expose davantage ces femmes à des poursuites judiciaires. À cet égard, le Nigéria se distingue comme pionnier en Afrique, où aucun pays n’a encore mis en place un système formel de taxation du travail du sexe en tant qu’activité économique.

 

Le Nigéria : Perspectives pour une fiscalité plus inclusive

 

Signées récemment par le président Bola Tinubu, ces réformes fiscales entreront en vigueur en janvier 2026 et visent à moderniser un système souvent critiqué pour son opacité. Elles pourraient générer des recettes supplémentaires substantielles, tout en posant les bases d’un dialogue national sur les droits des travailleurs informels.

Les autorités appellent à une sensibilisation accrue pour assurer une mise en œuvre fluide, tandis que les organisations de la société civile plaident pour des mesures complémentaires en matière de protection sociale. En définitive, cette décision inédite pourrait redéfinir les contours de l’économie nigériane, en intégrant ses marges les plus vulnérables au tissu fiscal national.

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