Lomé, 1ᵉʳ décembre 2025 – Le Togo endosse une fois de plus le rôle de pompier de l’Afrique de l’Ouest. En fin de semaine, la CEDEAO a mandaté le président Faure Gnassingbé pour diriger une mission tripartite de haut niveau, chargée de sortir la Guinée-Bissau du chaos né du putsch du 26 novembre.
La junte, qui invoque une manipulation électorale, a suspendu le processus de vote et fermé les frontières, accentuant les risques de dérapage violent.
LA SUITE APRÈS LA PUBLICITÉ
Aux côtés du Cap-Verdien José Maria Neves et du Sénégalais Bassirou Diomaye Faye, le chef de l’État togolais devra ramener les protagonistes autour de la table et empêcher qu’un pays coutumier des coups d’État ne sombre à nouveau dans la tourmente.
Lomé, quartier général de la crise
L’annonce n’a surpris personne dans les couloirs de la CEDEAO. En effet, déjà médiateur de l’Union africaine dans le conflit RDC-Rwanda, Faure Gnassingbé s’est imposé ces dernières années comme l’un des rares dirigeants ouest-africains capables de dialoguer avec tous les camps sans être accusé de partialité. « Il a cette capacité rare à écouter sans juger et à obtenir des concessions là où d’autres échouent », confie un diplomate nigérian en poste à Abuja.
La mission tripartite devrait se rendre à Bissau dès la semaine prochaine, après des premiers contacts avec la junte du général Denis N’Canha, le président déchu Umaro Sissoco Embaló — aujourd’hui au Congo-Brazzaville — et les principaux leaders politiques, dont Domingos Simões Pereira.
Objectif : un calendrier clair et un retour à l’ordre constitutionnel
Selon plusieurs sources proches du dossier, les trois médiateurs pousseront pour un plan d’action ferme :
- la fixation d’un calendrier électoral crédible sous 12 à 18 mois maximum
- la mise en place d’un gouvernement de transition inclusif
- le retour des forces armées dans les casernes avec garanties internationales
Un schéma qui rappelle étrangement la feuille de route imposée avec succès au Mali et au Burkina Faso ces dernières années, où le Togo avait déjà joué les facilitateurs discrets.
Faure, le médiateur en série
Avec cette nouvelle mission, Faure Gnassingbé conforte son statut de « Monsieur bons offices » de la sous-région. Au total, en cinq ans, Lomé a piloté ou co-piloté les médiations au Mali (2020-2022), en Guinée après le coup d’État contre Alpha Condé, au Burkina post-Damiba et maintenant en Guinée-Bissau, sans compter le dossier est-africain toujours en cours.
« Le président a fait de la stabilité régionale une priorité absolue. Par conséquent, il sait que chaque crise non résolue chez le voisin finit par déborder chez nous », explique un proche du palais.
Alors que les capitales ouest-africaines retiennent leur souffle face à l’instabilité chronique de Bissau, tous les regards se tournent désormais vers le trio Gnassingbé-Neves-Faye. Dans un pays qui a connu cinq coups d’État réussis en cinquante ans, la patience est une denrée rare. Cependant, si quelqu’un peut encore la faire renaître, c’est bien le discret mais redoutablement efficace président du Conseil togolais. La partie est loin d’être gagnée. Elle vient à peine de commencer.
