Dapaong : une lueur d’espoir pour femmes réfugiées à travers la résilience économique
Dans la région des Savanes, au nord du Togo, où les frontières se mêlent aux récits de vies brisées par les crises, une initiative porteuse d’espérance s’est déployée du 20 au 24 mai 2025. À Dapaong, des femmes réfugiées et déplacées, venues des confins du Burkina Faso et du Bénin, ont pris part à la deuxième phase d’une formation audacieuse, orchestrée sous l’égide de l’Association Avenir des Jeunes Filles de Dapaong (AJFD) et de ses partenaires internationaux. Ce programme, axé sur la méthodologie des Associations Villageoises d’Épargne et de Crédit (AVEC) et la création d’activités génératrices de revenus (AGR), a doté ces femmes d’outils concrets pour rebâtir leur avenir. Ironie du sort, dans une région où la précarité est reine, c’est par la solidarité et l’ingéniosité qu’elles tracent leur chemin.
Dapaong : l’autonomie financière au cœur de la formation des femmes réfugiées
Sous un soleil ardent, dans les salles communautaires de Dapaong, une cinquantaine de femmes venues des préfectures de Cinkassé, Kpendjal-Ouest, Tône, Tandjouaré et Oti se sont réunies pour parachever leur formation. L’objectif était ambitieux : leur transmettre les clés d’une gestion financière autonome à travers le modèle des AVEC, ces groupements où l’épargne collective devient un levier d’émancipation.
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Encadrées par des formatrices aguerries, elles ont appris à structurer des caisses de résilience, à gérer des microcrédits et à initier des AGR, allant de la transformation de produits agricoles à la confection artisanale. À cet égard, chaque participante, au nom de son groupement, a reçu un kit AVEC – un coffre-fort symbolique, contenant registres, calculatrices et fonds de démarrage – comme un gage de confiance en leur capacité à transformer leur quotidien.
Dans une région où les crises sécuritaires et climatiques, exacerbées par la proximité du Burkina Faso en proie à l’insécurité, jettent des milliers de familles sur les routes, ces femmes, souvent déracinées, se voient confier la lourde tâche de rebâtir leur stabilité. Les kits, bien que modestes, incarnent une promesse : celle d’une résilience qui ne dépend pas des caprices des puissants, mais de la détermination collective.
Un projet audacieux au cœur des savanes : la solidarité face à la précarité
La région des Savanes, frontalière du Burkina Faso et du Bénin, est un carrefour de vulnérabilités. Les violences perpétrées par des groupes armés non étatiques au Burkina Faso, combinées aux aléas climatiques comme les sécheresses et les inondations, ont poussé plus de 39 000 réfugiés, majoritairement maliens, et des milliers de déplacés internes à chercher refuge dans cette zone, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR). Les communautés d’accueil, elles-mêmes fragilisées, peinent à absorber cet afflux. Pourtant, c’est dans ce contexte de précarité que des initiatives comme celle de l’AJFD, soutenue par des partenaires tels que la Région Bourgogne-Franche-Comté et l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, s’efforcent de tisser des filets de sécurité économique.
Le programme, qui s’inscrit dans une dynamique transfrontalière, ne se contente pas de former. Il mise sur la pérennité en prévoyant un suivi rigoureux des groupements pour garantir l’utilisation judicieuse des fonds de résilience. « Nous ne donnons pas seulement des outils, nous semons des graines d’indépendance », confie une coordinatrice de l’AJFD, non sans une pointe d’orgueil face à l’ampleur du défi. Les bénéficiaires, parmi lesquelles des mères célibataires et des veuves de guerre, témoignent d’un regain d’espoir : la possibilité de vendre des beignets, des arachides transformées ou des pagnes tissés représente bien plus qu’un revenu ; c’est une dignité retrouvée.
Défis et espoirs : l’ironie d’un développement durable
Mais derrière cette lueur d’optimisme, une ironie persiste. Ces femmes, formées à l’art de l’épargne et de l’entrepreneuriat, opèrent dans un environnement où l’analphabétisme, la pauvreté et l’insécurité entravent leurs ambitions. Comme le souligne un rapport de Care International, l’analphabétisme reste un frein majeur au développement rural dans la région, limitant l’accès des femmes à une pleine maîtrise des outils financiers. De plus, la dépendance aux financements internationaux, si généreux soient-ils, pose la question de la durabilité de ces initiatives face à des crises structurelles profondes.
Et pourtant, l’ironie n’est pas une fatalité. Les groupements AVEC, inspirés de modèles éprouvés au Tchad et au Niger, ont démontré leur efficacité pour autonomiser les femmes dans des contextes similaires. À Ngouri, par exemple, plus de 2 400 femmes ont transformé leur vie grâce à ces associations, développant des commerces modestes, mais viables. À Dapaong, les prochaines étapes – des visites de suivi et des formations complémentaires – visent à consolider ces acquis, en s’assurant que les caisses de résilience ne soient pas de simples coffres, mais des tremplins vers une stabilité durable.
Dapaong 2025 : une révolution silencieuse pour un avenir meilleur des femmes réfugiées
En ce printemps 2025, Dapaong devient le théâtre d’une révolution silencieuse, portée par des femmes qui refusent de plier sous le poids des épreuves. Leur détermination, alliée à la solidarité des groupements, dessine un avenir dans lequel la résilience n’est pas un vœu pieux, mais une réalité tangible. Si les défis demeurent – insécurité, changement climatique, accès limité aux marchés –, ce programme rappelle que l’espoir peut naître des initiatives les plus modestes. En somme, dans les savanes, ces femmes ne se contentent pas de survivre : elles bâtissent, avec audace et ténacité, un rempart contre l’adversité.