À Lomé, le Togo franchit un cap décisif : un rapport alarmant sur les résidus de pesticides vient d’être validé. Objectif est de protéger la santé publique, restaurer les écosystèmes et amorcer une transition vers une agriculture durable.
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Lomé, 3 octobre 2025 –Dans un pays où l’agriculture nourrit plus de 60 % de la population, l’usage effréné de pesticides chimiques menace non seulement la santé des consommateurs, mais aussi la fragile toile des écosystèmes togolais. Le 30 septembre dernier, le ministère de l’Environnement et des Ressources Forestières (MERF) a clos un chapitre crucial avec l’atelier de validation d’un rapport final sur les résidus de pesticides dans les fruits et légumes. Ce document, fruit d’un projet pilote soutenu par la FAO, dresse un portrait alarmant de la contamination et ouvre la voie à une gestion plus rationnelle – un enjeu vital pour la résilience environnementale en Afrique de l’Ouest.
Alerte sur les pesticides : une épidémie silencieuse au cœur des champs togolais
Le secteur agricole togolais, pilier économique et social, ploie sous le poids de défis multiples : invasions de ravageurs amplifiées par le changement climatique, dégradation accélérée des sols et une pression démographique qui pousse les fermiers à maximiser les rendements. Par conséquent, on observe une intensification spectaculaire de l’usage des pesticides au cours des deux dernières décennies.
Insecticides, herbicides, rodenticides et fongicides – ces armes chimiques contre les nuisibles sont devenus omniprésents, mais leur application souvent anarchique génère des retombées catastrophiques.
Des études locales soulignent déjà l’ampleur du problème : à Lomé, seuls 6,3 % des maraîchers sont conscients des risques de contamination des eaux et de l’environnement par ces substances. Pire encore, des enquêtes révèlent des concentrations de résidus de pesticides dans les légumes bien au-delà des limites acceptables, exposant ainsi agriculteurs, consommateurs et écosystèmes à un cocktail toxique. En effet, ces produits, en s’infiltrant dans les sols et les nappes phréatiques, altèrent la biodiversité, déciment la faune aquatique et contribuent à l’eutrophisation des rivières – un cercle vicieux qui exacerbe la vulnérabilité face au réchauffement global.
Le projet FAO : de l’évaluation à l’action
C’est dans ce contexte que le « Projet d’appui à la gestion efficiente des pesticides dans le secteur agricole au Togo » (décembre 2023-septembre 2025) a vu le jour, financé par la FAO.
Porté par le MERF, il a permis une étude approfondie sur le commerce et l’utilisation des pesticides, l’élaboration d’un plan de renforcement des capacités, ainsi que la formation des directeurs préfectoraux de l’environnement et de la santé à une gestion rationnelle de ces produits.
Lors de l’atelier de validation à Lomé, une quarantaine de spécialistes – toxicologues, écologues et agronomes – ont disséqué le rapport final. Présentations, débats et amendements ont abouti à un consensus : ce document deviendra la feuille de route pour mobiliser de nouveaux financements et contrer la contamination des produits agricoles. « L’utilisation des pesticides est une réalité qui cause beaucoup de problèmes de santé, entre autres les cancers et les empoisonnements dans le pays », a martelé DJIWA Oyétoundé, chef de bureau de la FAO au Togo, soulignant les liens directs entre ces expositions chroniques et l’épidémie de maladies non transmissibles.
Ouvert par le Colonel DIMIZOU Aoufoh Koffi, Secrétaire Général du MERF, l’événement a résonné comme un appel à l’urgence. « Au nom du ministre, je remercie la FAO pour son appui financier. Les travaux de cet atelier vont aider à améliorer la sécurité sanitaire des aliments et à protéger les populations togolaises contre les risques liés à l’utilisation des pesticides », a-t-il déclaré, insistant sur l’impératif d’une approche holistique qui intègre la préservation des écosystèmes.
Au-delà de la santé : un bouclier pour la biodiversité
Pour un expert en environnement, ce rapport togolais transcende les frontières locales. Il met en effet en lumière un fléau continental : en Afrique subsaharienne, l’usage inadapté de pesticides – souvent importés sans évaluation rigoureuse des risques – érode la fertilité des sols, favorise la résistance des ravageurs et accélère la perte de biodiversité.
Des analyses récentes au Togo identifient des pesticides hautement dangereux, avec des impacts potentiels sur la santé humaine et l’environnement qui appellent à une régulation draconienne. Imaginez les conséquences : des chaînes alimentaires empoisonnées, des pollinisateurs en péril, et des aquifères contaminés qui compromettent l’accès à l’eau potable pour des générations.
Ce projet pilote pourrait inspirer une vague de réformes : promotion de l’agroécologie, surveillance satellitaire des zones à risque, et incitations à des alternatives biologiques. Par conséquent, en validant ce rapport, le Togo ne se contente pas de documenter un problème ; il pose les bases d’une transition vers une agriculture régénératrice, alignée sur les Objectifs de Développement Durable de l’ONU.
Reste à transformer ces mots en actes. Avec le climat qui s’emballe et les ressources qui s’épuisent, ce rapport n’est pas qu’un diagnostic – c’est un manifeste pour un Togo vert, résilient et vivable. Les experts du monde entier devraient y voir un modèle replicable : car protéger les champs d’aujourd’hui, c’est sauvegarder les forêts et les océans de demain.