Au Mali, l’ex-Premier ministre Choguel Maïga écroué pour malversations

Mali : Choguel Kokalla Maïga, ex-Premier ministre, incarcéré pour atteinte présumée aux biens publics   Bamako, 19 août 2025 —…

Accusé de malversations financières, l’ancien Premier ministre Choguel Maïga est placé sous mandat de dépôt, relançant le débat

Mali : Choguel Kokalla Maïga, ex-Premier ministre, incarcéré pour atteinte présumée aux biens publics

 

Bamako, 19 août 2025 — Dans un Mali sous haute tension, l’ancien Premier ministre Choguel Kokalla Maïga a été placé sous mandat de dépôt ce mardi. Accusé de malversations financières, cette affaire secoue la scène politique et interroge la gouvernance de la transition militaire.

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Une décision de justice qui frappe l’ancien chef de gouvernement

 

La justice malienne a franchi une étape décisive dans l’affaire Choguel Kokalla Maïga. Après une semaine de garde à vue au Pôle national économique et financier, la chambre d’instruction de la Cour suprême a ordonné son placement en détention à la maison d’arrêt de Bamako, comme l’a annoncé son avocat, Me Cheick Oumar Konaré. En fait, le procureur général a engagé des poursuites contre l’ex-chef du gouvernement pour « atteinte aux biens publics », s’appuyant sur un rapport accablant du Bureau du vérificateur général publié en juillet 2025.

 

Des soupçons de détournement de fonds publics

 

L’enquête, qui a conduit à son arrestation le 12 août, vise des irrégularités présumées dans la gestion financière de la Primature entre 2021 et 2024, période durant laquelle Maïga était à la tête du gouvernement de transition. Huit de ses anciens collaborateurs, dont son ex-directeur de cabinet, le professeur Issiaka Ahmadou Singaré, âgé de 80 ans, sont également impliqués dans l’affaire.

Bien que les autorités aient laissé Singaré en liberté sous contrôle judiciaire, les trois anciens directeurs administratifs et financiers de la Primature font face aux mêmes charges et sont toujours sous le coup de la justice. Selon une source judiciaire, les investigations se concentrent sur des soupçons de détournement de fonds publics, révélés par des anomalies dans les comptes de l’époque.

 

Maïga dénonce un complot et se dit serein

 

Dans une déclaration relayée par son avocat, Choguel Maïga se dit « serein » face à ces accusations, affirmant qu’un homme politique doit « s’attendre à tout, y compris l’emprisonnement ou pire ». Dans une vidéo diffusée le 3 août sur sa chaîne YouTube, il avait dénoncé une tentative d’intimidation, proclamant n’avoir « rien à se reprocher » et accusant certains cercles au pouvoir de chercher à le réduire au silence. Cette posture reflète le climat de tensions qui règne au Mali, où la junte militaire, dirigée par le général Assimi Goïta, fait face à des critiques croissantes.

 

Du Premier ministre du Mali à prisonnier politique ?

 

Figure emblématique du Mouvement du 5-Juin/Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), Maïga avait joué un rôle clé dans la chute du président Ibrahim Boubacar Keïta en 2020. Nommé Premier ministre en juin 2021, il incarnait alors la voix civile de la transition militaire, prônant un discours souverainiste face à la communauté internationale.

Cependant, ses relations avec le gouvernement de transition se sont détériorées, culminant avec son limogeage en novembre 2024, après qu’il eut publiquement critiqué son exclusion des décisions majeures et le report sine die des élections prévues pour mars 2024. Depuis, il n’a cessé de dénoncer les « arrestations arbitraires » et la militarisation croissante du pouvoir, marquée par la nomination du général Abdoulaye Maïga à sa succession.

 

Une justice au service du pouvoir ?

 

Cette affaire intervient dans un contexte politique et sécuritaire tendu, marqué par l’arrestation récente d’une cinquantaine de militaires, dont deux généraux, accusés de complot contre le gouvernement. L’incarcération de Maïga, ainsi que celle d’un autre ancien Premier ministre, Moussa Mara, le 1ᵉʳ août pour « atteinte au crédit de l’État », soulève des interrogations sur une possible volonté de museler les voix dissidentes. Des observateurs estiment que ces poursuites judiciaires pourraient viser à neutraliser les figures politiques influentes à l’approche d’éventuelles échéances électorales, toujours sans calendrier clair.

À la demande de son avocat, les autorités devraient transférer Maïga à la maison d’arrêt de Koulikoro, située à une cinquantaine de kilomètres de Bamako, dans l’attente de son procès. Me Konaré a réaffirmé que son client bénéficie de la présomption d’innocence et a exprimé sa confiance en la justice pour établir la vérité.

Mais dans un Mali où les voix dissidentes sont de plus en plus rares, la question demeure : cette affaire marquera-t-elle un tournant judiciaire ou un simple règlement de comptes politique ? L’avenir de la transition malienne dépendra-t-il de la capacité de sa justice à prouver son indépendance et à rassurer les Maliens sur le respect de l’État de droit ?

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