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Togo : L’Activiste Grâce Bikoyi placé sous mandat de dépôt

Une vidéo, un mandat de dépôt : Grâce Bikoyi, sage-femme et militante, paie le prix fort pour avoir dénoncé la…

Une vidéo, un mandat de dépôt : Grâce Bikoyi, sage-femme et militante, paie le prix fort pour avoir dénoncé la gouvernance togolaise.

 

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Lomé, 7 octobre 2025 – La rapidité avec laquelle une critique publique, formulée via une vidéo en ligne, peut entraîner une incarcération, révèle la brutalité de la situation pour les voix dissidentes au Togo. C’est dans ce contexte que Grâce Koumayi Bikoyi, sage-femme de 35 ans, mère de deux enfants et militante reconnue pour son franc-parler, a été placée sous mandat de dépôt.

Les forces de sécurité l’ont interpellée le vendredi 3 octobre 2025 à son domicile d’Agoè-Nyivé, devant ses enfants, avant de la placer en garde à vue au Service Central de Recherches et d’Investigations Criminelles (SCRIC). Puis, dans l’après-midi du lundi 6 octobre, présentée au procureur de la République, elle s’est vu notifier un mandat de dépôt pour des charges extrêmement lourdes : appel à la révolte et tentative d’atteinte à la sûreté intérieure de l’État. Par conséquent, ces accusations, qui sont dignes d’une procédure d’exception, ont conduit à sa reconduite au SCRIC en attendant son transfert à la prison civile de Lomé.

 

Grâce Bikoyi : la répression d’une voix critique

 

D’ailleurs, cette interpellation n’est pas un événement isolé ; elle marque la deuxième fois que l’expression de Grâce Bikoyi est muselée par l’appareil sécuritaire togolais. En effet, les forces de l’ordre l’avaient déjà interpellée le 6 juin 2025 lors d’une manifestation du Mouvement du 6 juin (M66) contre le régime, où elle aurait subi des traitements « cruels, inhumains et dégradants » avant qu’elles ne la relâchent.

Sur les réseaux sociaux, où elle jouit d’une large audience en tant qu’influenceuse engagée, ses publications et vidéos critiquent sans concession la mauvaise gouvernance : de l’absence de réaction face aux déclarations du ministre des Affaires étrangères, Robert Dussey, à l’ONU, aux appels en faveur d’une véritable alternance politique. « Silence does not protect us » (Le silence ne nous protège pas), a-t-elle lancé dans une vidéo devenue virale sur la plateforme X juste avant son arrestation – un réquisitoire direct contre l’illusion d’un régime qui étouffe les critiques sous couvert de « sûreté nationale ».

 

Indignation et mobilisation de la société civile

 

Les sources judiciaires restent évasives, affirmant que ces accusations, brandies comme un bouclier anti-dissidence, visent à « protéger l’ordre public ». Cependant, pour les observateurs, il s’agit d’une tentative manifeste de mise sous silence.

C’est pourquoi sur X, l’indignation a généré une vague de réactions virales. « Ce n’est plus de la justice, c’est de l’intimidation », a tweeté Marthe Fare, présidente de PEN International au Togo, appelant instamment à la libération de l’activiste. De même, Nathaniel Olympio, du front « Touche Pas à Ma Constitution », a dénoncé la « criminalisation de la contestation » et exigé sa libération immédiate et inconditionnelle.

Zeus Komi Aziadouvo a repris cet écho en déclarant : « La courageuse Grâce Bikoni Koumayi de nouveau arrêtée », avec des interpellations d’Amnesty International et de l’ONU pour alerter sur les violations des droits humains. Ainsi, en quelques heures, les hashtags ont connu un pic, transformant son cas en symbole de la jeunesse togolaise qui refuse le mutisme face à un système verrouillé.

Néanmoins, au-delà de l’agitation numérique, c’est une professionnelle de la santé publique, une sage-femme qui œuvre en première ligne, qui paie un prix élevé. La personne qui sauve des vies en salle d’accouchement se retrouve désormais à lutter pour sa propre liberté. Par conséquent, placée sous mandat de dépôt, elle attend dans l’incertitude.

Dans un Togo où le gouvernement met en avant les réformes économiques, cette affaire jette une ombre crue sur l’état de la liberté d’expression. Dès lors, la question demeure : peut-on innover et critiquer sans risquer l’incarcération ? Jusqu’où s’étendra cette spirale de la répression ?

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