En Guinée-Bissau, une mystérieuse hécatombe de vautours

Des centaines de vautours sont morts pour une raison mystérieuse ces derniers jours en Guinée-Bissau, ont indiqué mardi les autorités, qui ont recommandé aux populations d’éviter les contacts avec les cadavres des rapaces pour écarter les risques de contamination dans l’attente des résultats d’analyses vétérinaires.

Des dizaines de vautours morts ont notamment été retrouvés aux abords de l’abattoir principal de Bissau, où ils rôdent habituellement en grand nombre pour se nourrir de déchets de viande, ont indiqué des ouvriers de l’établissement.

Le phénomène a touché depuis environ une semaine plusieurs régions de cette ancienne colonie portugaise d’Afrique de l’Ouest au climat tropical, notamment Bafata (est), Quebo (sud) et l’archipel des Bijagos (ouest), avant d’atteindre la capitale.

« J’ai été avisé par des bouchers et la population de la découverte des carcasses de vautours. Au total, on en a dénombré une centaine, mais nous n’avons pas encore une source médicale ou vétérinaire pour nous donner les raisons (expliquant) autant de morts de vautours », a déclaré à la presse le gouverneur de la région de Bafata, Dundu Sambù.

Quelque 135 rapaces ont été incinérés lundi dans cette région, à l’écart des zones habitées et sous la surveillance des autorités sanitaires et de représentants de l’Etat, selon le journal bissau-guinéen O Democrata, qui estime à plus de 240 le nombres de rapaces morts ces derniers jours dans le pays.

Des prélèvements ont été effectués et seront analysés dans un laboratoire de Dakar, au Sénégal voisin, afin de déterminer s’il s’agit d' »une grippe aviaire ou non », a déclaré à l’AFP un responsable national des services vétérinaires, Mboma Baldé.

Les populations ont été invitées à éviter tout contact avec les oiseau morts et à empêcher les animaux domestiques de s’en approcher ou de s’en nourrir, a indiqué le gouverneur de Bafata, cité par O Democrata.

Dans les îles des Bijagos, au large de Bissau, où le vautour est un animal totem, des habitants ont sacrifié des poulets et répandu de l’huile de palme sur l’autel lors de cérémonies traditionnelles pour conjurer ce qu’ils estiment être une malédiction, a expliqué à l’AFP le fils d’un féticheur local.

Violences intercommunautaires à Delhi: Modi appelle au calme

Le Premier ministre indien Narendra Modi a appelé mercredi au calme face à des violences intercommunautaires qui ont fait 22 morts à New Delhi, marquant un des pires embrasements de la capitale indienne depuis des décennies.

Commerces mis à feu, drapeau hindou hissé sur une mosquée, Coran brûlé: des émeutiers armés de pierres, de sabres et parfois de pistolets, sèment le chaos et la terreur depuis dimanche dans des faubourgs populaires du nord-est de la mégapole, éloignés d’une dizaine de kilomètres du centre.

« J’appelle mes sœurs et frères de Delhi à maintenir en tout temps la paix et la fraternité. Il est important que le calme et la normalité soient rétablis au plus vite », a déclaré le dirigeant nationaliste hindou sur son compte Twitter.

Des heurts entre partisans et opposants d’une loi controversée sur la citoyenneté, jugée discriminatoire envers les musulmans par ses détracteurs, ont dégénéré en affrontements communautaires, entre hindous et musulmans.

Lors de multiples incidents rapportés par la presse indienne, des groupes armés hindous s’en sont pris à des lieux et à des personnes identifiés comme musulmans. Des témoignages concordants font état de bandes criant « Jai Shri Ram » (« Vive le dieu Ram »).

Le principal hôpital de la zone a recensé 22 décès et traité 200 blessés jusqu’à mercredi après-midi, a indiqué à l’AFP l’un de ses responsables. Une partie conséquente des patients souffraient de blessures par balles.

Mercredi, la situation sur le terrain était tendue mais aucune violence n’avait été signalée en milieu d’après-midi. Les autorités indiennes ont déployé en nombre des policiers en tenue antiémeutes.

Les forces de l’ordre demandaient aux habitants de se barricader chez eux, ont constaté des journalistes de l’AFP. Des pompiers arrosaient de leur lance à eau des échoppes brûlées la nuit précédente.

Dans un marché dévasté et calciné, le commerçant Abdul Hafees était venu constater les dégâts. Lundi, des émeutiers « ont utilisé l’essence de motos garées là et des pneus en caoutchouc pour s’assurer que tout brûlait », a-t-il raconté. Les vandales sont revenus mardi pour incendier des boutiques épargnées la veille.

« Je pense que toute échoppe encore intacte dans le marché, ils la brûleront ce soir », redoute-t-il.

– Mise en garde pakistanaise –

S’inquiétant de la « situation alarmante », le ministre en chef de Delhi, Arvind Kejriwal, a enjoint le gouvernement de Narendra Modi de mettre en place un couvre-feu dans la zone et déployer l’armée.

Un drapeau hindou, représentant le dieu-singe Hanuman, flottait mercredi matin au sommet d’une mosquée de quartier vandalisée, a vu une équipe de l’AFP. Des vidéos tournées la veille et circulant sur les réseaux sociaux, dont l’AFP a vérifié l’authenticité, montrent des hommes grimpant au minaret pour y arracher le haut-parleur et y installer le drapeau, sous les vivats.

Mohammad Muslim, un résident du quartier, a extrait un Coran en feu de la mosquée saccagée. « Vous pouvez voir que mes mains sont devenues noires pour avoir porté le Coran brûlé », a-t-il expliqué à l’AFP.

Narendra Modi est confronté depuis décembre à un vaste mouvement de contestation contre une nouvelle législation qui facilite l’attribution de la citoyenneté indienne à des réfugiés, à condition qu’ils ne soient pas musulmans.

Ce texte a cristallisé les craintes de la minorité musulmane d’être reléguée au rang de citoyens de seconde classe, dans cette nation où les hindous représentent 80% de la population.

La loi a provoqué les plus importantes manifestations dans le pays d’Asie du Sud depuis l’arrivée au pouvoir en 2014 de l’actuel chef de gouvernement, largement réélu l’année dernière.

Réagissant aux événements à New Delhi, le Premier ministre pakistanais Imran Khan a jugé mercredi que « lorsqu’une idéologie raciste fondée sur la haine prend le pouvoir, cela mène au bain de sang », en référence au nationalisme hindou.

Le dirigeant de la république islamique a mis en garde ses concitoyens contre des représailles sur la minorité hindoue au Pakistan. « Nos minorités sont des citoyens égaux dans ce pays », a-t-il tweeté.

Nouveau coronavirus: l’Iran accuse les Etats-Unis de répandre « la peur »

L’Iran a accusé mercredi les Etats-Unis, son ennemi juré, de répandre « la peur » autour du nouveau coronavirus dont le bilan local est de 19 morts, le plus lourd après celui de la Chine, avec de nouveaux cas détectés aux quatre coins du pays.

Le porte-parole du ministère de la Santé Kianouche Jahanpour a affirmé que la situation « s’améliorait » mais a tout de même appelé les Iraniens à limiter leurs déplacements.

M. Jahanpour a annoncé le décès de quatre nouvelles personnes parmi 44 nouveaux cas de personnes infectées par le nouveau coronavirus détectés ces dernières 24h.

Près de 140 personnes, dont le vice-ministre de la Santé, ont été infectées par la maladie à travers le pays et la plupart des voisins de la République islamique ont mis en place des mesures de restrictions des déplacements et de placement en quarantaine.

Nombre d’écoles, universités et centres culturels ou sportifs ont été fermés et de nombreux événements repoussés pour permettre à des équipes sanitaires de désinfecter les lieux et transports publics iraniens.

– « Peur extrême » –

« Nous ne devrions pas laisser l’Amérique ajouter un virus, appelé la peur extrême (…), au coronavirus », a déclaré le président iranien Hassan Rohani à l’issue d’une réunion de son cabinet au lendemain d’une déclaration du secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo appelant l’Iran à « dire la vérité » au sujet de l’épidémie en Iran.

« Les Américains eux-mêmes sont en difficulté face au coronavirus. 16.000 personnes sont mortes de la grippe (aux Etats-Unis) mais ils ne parlent pas de leurs propres (morts) », a ajouté M. Rohani.

Mi-février, les autorités américaines ont étendu les tests du nouveau coronavirus aux personnes présentant des symptômes grippaux. Les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) américains avaient alors indiqué que 14.000 décès dus à la grippe avaient été recensés pour la saison 2019-2020.

« Le régime iranien aurait caché des détails vitaux sur l’épidémie dans ce pays », a affirmé Mike Pompeo, lors d’une conférence à Washington, dans un contexte de tensions exacerbées entre l’Iran et les Etats-Unis.

La veille, un député de Qom avait fait état de 50 morts des suites du nouveau coronavirus. Le vice-ministre de la Santé Iraj Harirchi a démenti ces propos lundi, promettant de démissionner si ce chiffre était confirmé, avant d’annoncer mardi qu’il avait été lui-même contaminé par le virus.

Le porte-parole du gouvernement Ali Rabii, aux côtés duquel M. Harirchi était apparu toussant et transpirant lors d’une conférence de presse lundi, attend lui les résultats de son test.

Depuis l’annonce le 19 février des deux premiers décès dus à la maladie, à Qom, ville sainte chiite du centre du pays qui attire pèlerins et théologiens du monde entier, le gouvernement a promis d’être plus transparent après avoir été accusé de minimiser le bilan de l’épidémie sur son sol et de mal gérer la propagation du virus.

M. Rohani a insisté mercredi sur les progrès de l’Iran face à l’épidémie, évoquant une « baisse des visites (à l’hôpital) et des progrès dans le traitement ».

– « Légèrement préoccupante » –

Selon le dernier bilan du ministère de la santé, plus de la moitié des 31 provinces sont touchées: neuf nouveaux cas ont été détectés à Qom, quatre à Téhéran, neuf à Gilan, trois au Khuzestan et deux au Sistan-Balouchistan, à Fars et au Kohgilouyeh-Bouyer-Ahmad.

Un nouveau cas a été détecté dans chacune des province de Markazi, Kermanshah, Ardebil, Mazandaran, Lorestan, Semnan et Hormozgan.

Le porte-parole du ministère de la Santé, M. Janhanpour, est néanmoins apparu optimiste quant à la situation à Qom, épicentre de l’épidémie dans le pays.

« Toutes les 24 heures, au moins 10% de ceux qui sont hospitalisés ou des cas suspects sont autorisés à sortir et sont en bonne santé », a-t-il déclaré.

Mais à Gilan, province située au bord de la mer Caspienne et très prisée des vacanciers notamment téhéranais, « la situation est légèrement préoccupante » puisqu’elle est la deuxième en termes de nouveaux cas détectés, dont beaucoup sont des personnes qui avaient voyagé dans d’autres provinces.

Les autorités ont invité les Iraniens à limiter leur déplacement mais n’ont annoncé aucune mesure de placement en quarantaine, jugeant cette méthode obsolète et inefficace.

Grève générale dans les îles grecques contre les camps de migrants

Les îles grecques de Lesbos, Chios et Samos menaient mercredi une grève générale pour protester contre la construction de nouveaux camps pour les migrants.

Pour le deuxième jour consécutif, les manifestants à Lesbos ont fait face à la police anti-émeutes près de la ville de Mantamados, proche du site prévu pour la construction d’un camp de 7.000 personnes.

De petits groupes ont jeté des pierres vers la police, qui a répondu avec du gaz lacrymogène et des grenades aveuglantes.

« Nous sommes en temps de guerre. (La police) a les armes, nous avons nos coeurs et nos âmes », a déclaré un prêtre local, le père Stratis.

Le gouvernorat local a appelé à une grève de 24 heures, rejetant les projets du gouvernement de construire de nouveaux camps pour remplacer les installations actuelles surpeuplées, dans lesquelles les demandeurs d’asile vivent dans des conditions épouvantables.

Plus de 38.000 migrants s’entassent dans les camps des îles de Lesbos, Samos, Chios, Leros et Kos, officiellement prévus pour 6.200 personnes.

Les habitants des îles se plaignent depuis longtemps des problèmes d’insécurité et de santé publique que causent selon eux les migrants et s’opposent aux projets de construction de nouveaux camps du gouvernement.

« Nous nous battons également pour ceux qui veulent partir pour un endroit meilleur. Nous voulons qu’ils partent », a déclaré le père Stratis. « Nous accepterons les réfugiés de guerre, mais les criminels devraient partir ».

Le gouvernement conservateur, arrivé au pouvoir en juillet, a annoncé que les camps de Lesbos, Samos et Chios seront fermés cette année pour être remplacés par de nouvelles installations, plus petites, qui devraient être opérationnelles mi-2020.

Après des semaines de pourparlers infructueux avec les autorités locales, le gouvernement a envoyé lundi par bateau des engins de chantier et la police anti-émeutes, provoquant l’indignation.

Les partis d’opposition ont dénoncé une décision antidémocratique, et les responsables locaux une tentative « barbare » de « transformer de force Lesbos et Chios en prisons ».

L’Etat avait déjà mis en colère les insulaires courant février en annonçant que des terres pourraient être réquisitionnées pour une période de trois ans pour construire les nouveaux camps.

« Il y a une limite à notre patience. Ils réquisitionnent des terres et amènent la police anti-émeutes, utilisent les lacrymogènes contre les gens. Sommes-nous en guerre ? », s’est indigné Stratos Paspalas, un boucher à la retraite.

En Afrique du Sud, un projet de budget acrobatique sur fond de crise

Le ministre sud-africain des Finances Tito Mboweni dévoile mercredi après-midi devant le Parlement du Cap (sud-ouest) un projet de budget annuel aux allures de quadrature du cercle dans une économie au bord du précipice financier.

Croissance molle, détérioration des finances publiques, chômage de masse (30%) et, plus récemment, pannes d’électricité à répétition, la liste des plaies qui affectent le pays le plus industrialisé du continent est longue.

Le président Cyril Ramaphosa a lui-même reconnu sans détour la gravité de la situation la semaine dernière.

La dette publique « atteint des niveaux insoutenables » et « l’économie n’a pas renoué avec une croissance significative depuis une décennie », a-t-il déploré devant les parlementaires lors de son discours annuel sur l’état de la Nation.

Deux ans après le départ anticipé de son prédécesseur Jacob Zuma pour cause de scandales de corruption à répétition, le bilan dressé par M. Ramaphosa sonne comme un constat d’échec.

En prenant les rênes du pays en février 2018, l’ex-syndicaliste des heures sombres de l’apartheid reconverti en capitaine d’industrie s’était pourtant fait fort de relancer le pays en y faisant revenir les investisseurs étrangers.

Sans succès jusque-là. Le produit national brut (PNB) sud-africain n’a pas dépassé 1,3% ces cinq dernières années et devrait péniblement s’établir à 0,5% en 2019.

« Le gouvernement reste incapable d’imposer politiquement les réformes drastiques qu’il a promises », note Darias Jonker, du centre d’analyse Eurasia Group. Il s’est montré « incapable de réduire les déficits », renchérit l’économiste en chef de l’Old Mutual Investment Group, Johann Els.

Dans ce climat, le discours de Tito Mboweni à partir de 12h00 GMT sera observé à la loupe.

« C’est maintenant ou jamais », juge M. Els.

– Dégradation annoncée –

Avec une dette publique proche de 60% du PNB, sa marge de manoeuvre s’annonce des plus limitées.

Le ministre des Finances se sait en outre sous la menace d’une dégradation de la note financière de l’Afrique du Sud par l’agence Moody’s, la seule des trois grandes à ne pas l’avoir encore dégradée au rang d’investissement spéculatif.

Fitch and S&P l’ont reléguée dans cette catégorie dès 2017.

« Nous ne sommes plus très loin d’une dégradation de Moody’s. Si nous ne stabilisons pas le déficit et ne contrôlons pas nos dépenses, ils n’hésiteront pas à le faire », avertit Johann Els.

Une telle sanction pourrait causer un exode des investisseurs et accroître la pression sur la devise locale, le rand.

De l’avis de tous les analystes, les mauvaises performances de l’économie sud-africaine sont largement imputables à sa mauvaise gestion, ainsi que l’illustre la situation financière inquiétante des entreprises publiques du pays.

L’Etat est contraint de renflouer régulièrement les caisses des deux plus emblématique d’entre elles, le géant de l’électricité Eskom et la compagnie South African Airways. Les difficultés du premier ont même convaincu la Banque mondiale d’abaisser sous les 1% sa prévision de croissance pour 2020.

« Le gouvernement doit s’éloigner au plus vite de la culture des dépenses de consommation pour privilégier les investissements dans les infrastructures », recommande Azar Jammine, l’économiste en chef du consultant Econometrix.

L’opposition, elle, agite déjà la menace d’une « crise fiscale ».

« L’insuffisance de la croissance exclut de nouveaux impôts pour accroître les recettes », a estimé le député Geordin Hill-Lewis, en charge des Finances au sein de l’Alliande démocratique (DA).

Le ministre « doit présenter un plan crédible pour stabiliser la dette nationale et contenir le déficit budgétaire », a-t-il ajouté.

Tunisie: vote de confiance attendu pour le nouveau gouvernement

Le Parlement tunisien devrait accorder mercredi, sauf coup de théâtre, sa confiance au nouveau gouvernement, qui a été constitué après quatre mois d’intenses négociations et doit s’atteler à d’importants dossiers socio-économiques en suspens.

Dans le cas contraire, un second rejet après l’échec d’un premier cabinet en janvier ouvrirait la porte à la dissolution de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) élue le 6 octobre et à des élections anticipées.

Le gouvernement proposé par Elyes Fakhfakh se compose de 15 membres appartenant à des partis politiques et 17 autres présentés comme des personnalités indépendantes qui se voient confier notamment les ministères régaliens.

Plus grande force au Parlement, le parti d’inspiration islamiste Ennahdha (54 députés) obtient six ministères.

Même s’il n’a pas décroché les ministères qu’il convoitait, Ennahdha a affirmé dans un communiqué mardi soir qu’il voterait en faveur de ce cabinet.

D’autres blocs parlementaires comme le Courant démocrate (22 sièges) et le Mouvement du peuple (16 sièges) ont manifesté également leur soutien au gouvernement qui doit obtenir la majorité absolue de 109 voix sur 2017, au sein d’une Assemblée particulièrement morcelée.

– « Très fortes chances » –

La parti libéral Qalb Tounes (38 sièges, deux force dans l’ARP), de l’homme d’affaire Nabil Karoui, n’a pas été sollicité pour faire partie du gouvernement, et se pose ainsi dans l’opposition.

Mais, a-t-il fait savoir mardi après une réunion de son bureau, s’il y avait un risque que le gouvernement n’obtienne pas la majorité des voix et donc que l’assemblée soit dissoute, il déciderait alors d’approuver l’équipe de M. Fakhfakh.

Ce vote intervient après un accord de dernière minute le 19 février entre le président tunisien Kais Saied et Ennahdha.

« Sauf grosse surprise, le gouvernement Fakhfakh a de très fortes chances d’obtenir le vote de confiance de l’ARP », avance mercredi le journal francophone Le Quotidien.

Dans ce gouvernement qui ne compte que six femmes, les ministères de la Justice et de l’Intérieur, très convoités, ont été confiés respectivement à une juge présentée comme indépendante, Thouraya Jeribi, et à un ancien cadre ministériel récemment nommé conseiller juridique de la présidence, Hichem Mechichi.

La Défense revient à l’ancien dirigeant de l’Instance nationale d’accès à l’information (Inai), Imed Hazgui, et les Affaires étrangères à un ancien ambassadeur à Oman, Noureddine Erraï.

Un seul ministre est issu du cabinet sortant, le ministre des Affaires religieuses Ahmed Adhoum. Le ministre du Tourisme René Trabelsi, premier ministre de confession juive en Tunisie depuis la période de l’indépendance, a en revanche été écarté, dans un contexte de forte défiance envers tout ce qui peut être lié à Israël.

En janvier, un précédent gouvernement constitué sous la houlette d’Ennahdha avait échoué à obtenir la confiance des députés.

– Quelle marge de manoeuvre ? –

La Tunisie est donc gérée depuis plus de quatre mois par le gouvernement sortant, alimentant un attentisme qui ralentit la vie publique et économique du pays.

Le nouveau gouvernement devra notamment relancer les discussions avec les bailleurs de fonds, à commencer par le Fonds monétaire international, dont le programme entamé en 2016 s’achève en avril/mai 2020.

« La question qui se pose maintenant, c’est la marge du manœuvre accordée à ce gouvernement, qui permettra de mesurer son efficacité », a souligné le politologue Selim Kharrat, de l’ONG Bawsala, observatoire de la vie publique.

Quant aux Tunisiens, neuf ans après avoir chassé le dictateur Zine el Abidine Ben Ali lors du Printemps arabe, ils attendent toujours un gouvernement démocratique à même de s’attaquer aux nombreux maux socio-économiques qui rongent leur pays.

« La patience a ses limites et tout le monde attend au tournant le nouveau gouvernement avec cette grogne qui risque de s’amplifier », écrit dans son éditorial Le Temps.

Et « plombé par des dissensions idéologiques entre les membres de son équipe et une opposition qui l’attend de pied ferme, Elyes Fakhfakh aura certainement bien du mal à mettre en pratique son programme », estime ce quotidien francophone.

Alpha Condé, ex-opposant historique accusé de dérive autoritaire

Aux scrutins qui s’annoncent en Guinée, c’est avant tout de lui qu’il s’agit: Alpha Condé, l’opposant historique devenu président, accusé par ses adversaires de dérive autocratique au point de chercher à plier la Constitution à son ambition de troisième mandat.

Malgré la contestation et les manifestants tués, M. Condé, 82 ans la semaine prochaine, n’entend pas se laisser dévier de la voie qu’il s’est tracée: doter son pays d’une Constitution « moderne », soumise dimanche à un référendum le même jour que des législatives. Quant à briguer sa propre succession fin 2020, « ça, c’est le parti qui décidera », dit-il.

De longues années d’opposition en exil, la prison, une accession quasi miraculeuse au pouvoir et deux mandats présidentiels ont forgé le caractère de cet homme svelte qui boîte légèrement.

M. Condé, qui se réclame de la gauche, est un orateur érudit, sachant enthousiasmer son auditoire. Mais il goûte peu la contradiction et ses adversaires le décrivent comme un homme autoritaire et impulsif.

« Personne ne dicte à la Guinée ce qu’elle doit faire », a-t-il averti un parterre de diplomates en janvier.

« Condé a fait des choses importantes pour faire progresser la Guinée », convient Jim Wormington, de Human Rights Watch. Mais avec les violences policières des derniers mois, « il serait difficile d’en dresser un portrait positif. C’est ce qui rend les choses si tristes ».

Né le 4 mars 1938 à Boké (ouest), M. Condé est issu de l’ethnie malinké, la deuxième du pays.

Il part en France dès l’âge de 15 ans et y obtient des diplômes en économie, droit et sociologie. Il enseigne ensuite à l’université parisienne de la Sorbonne.

– Condamné à mort –

Parallèlement, il dirige dans les années 1960 la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF) et anime des mouvements d’opposition au régime dictatorial d’Ahmed Sékou Touré, « père de l’indépendance » de la Guinée, colonie française jusqu’en 1958.

Sékou Touré le fait condamner à mort par contumace en 1970.

Il rentre au pays en 1991, sept ans après la mort de Sékou Touré, auquel a succédé l’officier Lansana Conté. Aux présidentielles de 1993 et 1998, ni libres ni transparentes, Condé est officiellement crédité de 27% et de 18% des voix.

Le fondateur du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) inquiète Lansana Conté, qui le fait arrêter juste après la présidentielle de 1998. Il est condamné en 2000 à cinq ans de prison pour « atteintes à l’autorité de l’Etat et à l’intégrité du territoire national ». Sous la pression internationale, il est gracié en 2001.

Il reste dans l’opposition après l’avènement de la junte du capitaine Moussa Dadis Camara en 2008. Mais en 2010, le « Professeur Alpha Condé » est enfin élu, au second tour, après avoir été très nettement distancé au premier par l’ex-Premier ministre Cellou Dalein Diallo. Il est réélu au premier tour en 2015.

Il a « tellement déçu », juge Cellou Dalein Diallo, actuel chef de file de l’opposition, selon qui M. Condé a instauré « une république bananière, une dictature qui ne dit pas son nom ».

Sanguin, Alpha Condé l’est certainement. Un jour, il réprimande des étudiants qui lui réclament les tablettes informatiques promises pendant sa campagne. « Vous êtes comme des cabris: +Tablettes, Tablettes!+ », grince-t-il, sautant sur place à pieds joints.

– Appel à cogner –

Il se targue de son bilan: réalisation de barrages hydroélectriques, révision des contrats miniers et mise au pas de l’armée, le tout alors que le pays a fait face à une épidémie d’Ebola (fin 2013-2016).

La grande affaire de son deuxième mandat est son projet de doter la Guinée d’une Constitution « qui réponde aux besoins du monde d’aujourd’hui », dont la lutte contre les mutilations génitales des filles et les mariages précoces, ou un juste partage des richesses, dans un pays pauvre malgré ses ressources minières.

Depuis octobre, un collectif de partis, de syndicats et d’associations a fait descendre dans les rues des dizaines, voire des centaines de milliers de Guinéens pour s’opposer à la réforme.

Certes, le projet de réforme maintient à deux le nombre de mandats autorisé. Mais, pour l’opposition, la nouvelle Constitution servira à M. Condé de prétexte pour remettre son compteur présidentiel à zéro.

« Après s’être pris pour Mandela, il a décidé de devenir Bokassa », l’ancien empereur de Centrafrique, accuse le collectif.

La vague de protestations, durement réprimée à plusieurs reprises, a coûté la vie à au moins 30 civils et un gendarme depuis octobre, sans le faire plier.

L’opposition promet d’empêcher de voter dimanche.

« Quiconque viendra pour détruire les urnes, frappez-le! », a lancé le président à ses partisans.

Marié trois fois, M. Condé est père d’un garçon.

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Tunisie: vote de confiance attendu pour le nouveau gouvernement

Le Parlement tunisien devrait accorder mercredi, sauf coup de théâtre, sa confiance au nouveau gouvernement, qui a été constitué après quatre mois d’intenses négociations et doit s’atteler à d’importants dossiers socio-économiques en suspens.

Dans le cas contraire, un second rejet après l’échec d’un premier cabinet en janvier ouvrirait la porte à la dissolution de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) élue le 6 octobre et à des élections anticipées.

Le gouvernement proposé par Elyes Fakhfakh se compose de 15 membres appartenant à des partis politiques et 17 autres présentés comme des personnalités indépendantes qui se voient confier notamment les ministères régaliens.

Plus grande force au Parlement, le parti d’inspiration islamiste Ennahdha (54 députés) obtient six ministères.

Même s’il n’a pas décroché les ministères qu’il convoitait, Ennahdha a affirmé dans un communiqué mardi soir qu’il voterait en faveur de ce cabinet.

D’autres blocs parlementaires comme le Courant démocrate (22 sièges) et le Mouvement du peuple (16 sièges) ont manifesté également leur soutien au gouvernement qui doit obtenir la majorité absolue de 109 voix sur 2017, au sein d’une Assemblée particulièrement morcelée.

– « Très fortes chances » –

La parti libéral Qalb Tounes (38 sièges, deux force dans l’ARP), de l’homme d’affaire Nabil Karoui, n’a pas été sollicité pour faire partie du gouvernement, et se pose ainsi dans l’opposition.

Mais, a-t-il fait savoir mardi après une réunion de son bureau, s’il y avait un risque que le gouvernement n’obtienne pas la majorité des voix et donc que l’assemblée soit dissoute, il déciderait alors d’approuver l’équipe de M. Fakhfakh.

Ce vote intervient après un accord de dernière minute le 19 février entre le président tunisien Kais Saied et Ennahdha.

« Sauf grosse surprise, le gouvernement Fakhfakh a de très fortes chances d’obtenir le vote de confiance de l’ARP », avance mercredi le journal francophone Le Quotidien.

Dans ce gouvernement qui ne compte que six femmes, les ministères de la Justice et de l’Intérieur, très convoités, ont été confiés respectivement à une juge présentée comme indépendante, Thouraya Jeribi, et à un ancien cadre ministériel récemment nommé conseiller juridique de la présidence, Hichem Mechichi.

La Défense revient à l’ancien dirigeant de l’Instance nationale d’accès à l’information (Inai), Imed Hazgui, et les Affaires étrangères à un ancien ambassadeur à Oman, Noureddine Erraï.

Un seul ministre est issu du cabinet sortant, le ministre des Affaires religieuses Ahmed Adhoum. Le ministre du Tourisme René Trabelsi, premier ministre de confession juive en Tunisie depuis la période de l’indépendance, a en revanche été écarté, dans un contexte de forte défiance envers tout ce qui peut être lié à Israël.

En janvier, un précédent gouvernement constitué sous la houlette d’Ennahdha avait échoué à obtenir la confiance des députés.

– Quelle marge de manoeuvre ? –

La Tunisie est donc gérée depuis plus de quatre mois par le gouvernement sortant, alimentant un attentisme qui ralentit la vie publique et économique du pays.

Le nouveau gouvernement devra notamment relancer les discussions avec les bailleurs de fonds, à commencer par le Fonds monétaire international, dont le programme entamé en 2016 s’achève en avril/mai 2020.

« La question qui se pose maintenant, c’est la marge du manœuvre accordée à ce gouvernement, qui permettra de mesurer son efficacité », a souligné le politologue Selim Kharrat, de l’ONG Bawsala, observatoire de la vie publique.

Quant aux Tunisiens, neuf ans après avoir chassé le dictateur Zine el Abidine Ben Ali lors du Printemps arabe, ils attendent toujours un gouvernement démocratique à même de s’attaquer aux nombreux maux socio-économiques qui rongent leur pays.

« La patience a ses limites et tout le monde attend au tournant le nouveau gouvernement avec cette grogne qui risque de s’amplifier », écrit dans son éditorial Le Temps.

Et « plombé par des dissensions idéologiques entre les membres de son équipe et une opposition qui l’attend de pied ferme, Elyes Fakhfakh aura certainement bien du mal à mettre en pratique son programme », estime ce quotidien francophone.

Accord nucléaire iranien: réunion de conciliation ardue à Vienne

Les Européens, la Chine et la Russie ont commencé mercredi à chercher avec l’Iran un terrain d’entente sur son programme nucléaire, lors de leur première rencontre depuis le lancement d’une procédure contre Téhéran, accusé de violer l’accord de 2015.

Qualifiée dans les médias par le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov de « chance pour arrêter l’escalade avant qu’il ne soit trop tard », leur réunion se déroule à Vienne, en Autriche, au niveau des directeurs politiques.

Elle a lieu dans le cadre de la commission mixte, l’instance de discussion prévue par l’accord sur le nucléaire iranien. Aucun délégué n’a fait de commentaire à son arrivée à l’hôtel où ont lieu les discussions, a constaté l’AFP.

Aux termes du mécanisme de règlement des différends prévu par l’accord, les parties doivent tenter de trouver une solution avant de décider s’il convient de la soumettre aux ministres des Affaires étrangères.

L’absence de conciliation peut mener au rétablissement par le Conseil de sécurité de l’ONU de toutes les sanctions qui avaient été levées dans le cadre de l’accord de Vienne, mais les Européens assurent que tel n’est pas leur objectif.

La rencontre est présidée par Helga Schmid, spécialiste du dossier auprès du haut représentant de l’UE, Josep Borrell. Outre l’Iran, elle réunit des représentants de la Chine, la Russie, du Royaume-Uni, la France et l’Allemagne.

L’accord historique de Vienne est sérieusement menacé depuis que les Etats-Unis l’ont dénoncé unilatéralement en 2018. Téhéran, asphyxié par les sanctions, a riposté en s’affranchissant, depuis mai 2019, de plusieurs de ses engagements tous les deux mois, rappelle l’ONG américaine Arms Control Association.

Les Européens considèrent que les violations décidées par les autorités iraniennes ne sont toutefois pas encore toutes irréversibles. Pour l’instant, l’Iran a déclaré qu’il poursuivrait sa coopération avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), permettant aux inspecteurs d’avoir accès aux installations déclarées.

« Nous avons tous intérêt à sauver le JCPOA (acronyme anglais pour Plan d’action global commun, désignant l’accord) pour que les inspecteurs puissent continuer leur travail en Iran », estime un diplomate interrogé par l’AFP.

– Mécanisme de troc –

Mais les négociations entre l’Iran, les Européens, la Chine et la Russie n’ont « pas de date butoir » et « on est encore loin d’un résultat », un calendrier n’ayant pas été arrêté, a-t-il ajouté.

A la mi-février, l’Iran s’est dit disposé à annuler tout ou partie des mesures prises pour se désengager de l’accord, seulement si l’Europe lui assure en échange des avantages économiques « significatifs ».

En janvier 2019, un mécanisme de troc nommé Instex a été créé par les Européens pour contourner les sanctions américaines imposées à l’Iran en évitant d’utiliser le dollar.

Instex doit fonctionner comme une chambre de compensation permettant à l’Iran de continuer à vendre du pétrole et d’importer en contrepartie d’autres produits. Il n’a jusqu’à présent favorisé aucune transaction.

L’Iran réclame notamment des achats de pétrole pour limiter l’impact économique des sanctions américaines. En échange, Téhéran pourrait « au moins geler ses stocks d’uranium » selon le diplomate.

Téhéran produit actuellement de l’uranium enrichi à un taux supérieur au seuil de 3,67% fixé par l’accord et ne respecte plus la limite de 300 kilos imposée à ses stocks d’uranium enrichi.

L’Iran a affirmé début janvier qu’il ne se sentait désormais plus tenu par aucune limite « sur le nombre de ses centrifugeuses ».

Ces prochains jours, l’AIEA, basée à Vienne, doit remettre à ses pays membres les résultats de ses dernières inspections sur les capacités techniques de l’Iran et le stock d’uranium enrichi.

L’accord de 2015 offre à l’Iran la levée d’une partie des sanctions internationales en échange de garanties destinées à prouver la nature exclusivement civile de son programme nucléaire.

Coronavirus en Italie: combattre la peur

Personnes en panique, en proie à des angoisses de mort, perdant contact avec la réalité… le nouveau coronavirus en Italie et les mesures spectaculaires pour l’enrayer ont créé une « épidémie de peur » parallèle à la crise sanitaire, selon des psychologues.

L’annonce de premiers décès en Italie et la mise en quarantaine de plus de 50.000 personnes dans onze villes du Nord, la fermeture des écoles et l’annulation des rassemblements sportifs et culturels ont créé une véritable psychose en début de semaine, racontent des professionnels.

Celle-ci s’est d’abord manifestée par la prise d’assaut de supermarchés, typique d’une « angoisse de mort », selon la psychiatre Rossella Candela, à Rome.

« Certains s’adaptent. D’autres agissent comme s’ils étaient sous les bombardements durant la Seconde Guerre mondiale », explique-t-elle par téléphone.

La ruée sur les masques – quasiment introuvables désormais dans les pharmacies du Nord – participe du même phénomène.

Passé le premier mouvement de panique, reste une angoisse permanente, régulière, alimentée par la rupture de la normalité.

« Certaines dispositions ont accru l’anxiété: la fermeture des écoles, des églises… Dans nos petits villages lombards, l’annulation de la messe, c’est fou, c’est du jamais vu », souligne Alessandra Braga, psychothérapeute à Brescia (Lombardie, nord).

« J’ai passé la journée de lundi dans mon cabinet à tenter de ramener mes patients à la réalité », raconte-t-elle à l’AFP.

Ecoles et bureaux fermés oblige, « beaucoup passent la journée à la maison à regarder la télé, ça ne parle que du coronavirus, c’est totalement anxiogène. J’essaye de les convaincre de sortir, de s’aérer », poursuit Mme Braga.

Mais, constate-t-elle, « c’est comme une épidémie émotive. Et c’est très difficile à gérer, l’émotivité ».

– Peur et racisme anti-chinois –

Depuis le début de la crise, les autorités italiennes ont insisté sur le côté préventif des mesures et rassuré en parlant de « situation sous contrôle ».

Mais pour le psychologue Gabriele Zanardi, exerçant à Pavie (Lombardie), « le problème naît de l’interprétation: fermer les écoles, la quarantaine sont des mesures de prévention, mais les gens les voient comme la preuve que la catastrophe est là. Ce sont des mesures +choquantes+, alors qu’en réalité elles sont raisonnables », explique-t-il.

Difficile de lutter face à la peur suscitée par « quelque chose d’intangible, d’invisible, comme l’est un virus », reconnaît-il.

« Du coup on cherche à donner un visage à cet ennemi invisible: ce sera le Chinois, la personne enrhumée… ».

A Milan, le quartier chinois est désert depuis trois jours: commerçants et restaurateurs ont pris les devants et préféré fermer boutique. Par peur d’être ostracisés dans une région gouvernée par la Ligue d’extrême droite de Matteo Salvini.

A Turin, après l’annonce du premier mort de l’épidémie, une Chinoise de 40 ans a été rouée de coups dans la rue par des inconnus qui ont crié: « tu as le virus, va-t’en sinon je te tue ».

« L’Italie est devenue un pays qui a peur », s’inquiète auprès du journal La Stampa Mariella Enoc, directrice de l’hôpital Bambino Gesu à Rome. « Les phobies concernant ce virus sont en train de prendre le pas sur la raison et la parole scientifique ».

– Humour –

Pour les psychologues interrogés par l’AFP, le problème le plus inquiétant vient des « fake news » qui tournent en boucle. La fausse annonce de la fermeture de toutes les écoles italiennes jusqu’au 5 mars a dû faire l’objet d’un démenti officiel mardi.

Les théories complotistes s’emballent: le virus resterait actif jusqu’à six jours sur les paquets en provenance de Chine, l’épidémie viserait à tuer l’économie de la riche Lombardie…

Paradoxalement, les gens en quarantaine apparaissent moins inquiets que ceux qui se trouvent à l’extérieur. « Ils sont confrontés à la réalité, alors que ceux de l’extérieur n’ont que la perception des choses », souligne Gabriele Zanardi.

Reste, heureusement, l’humour. C’est cette femme qui s’exclame: « Après une semaine enfermés à la maison, si mes enfants ne meurent pas du coronavirus, je les tue moi-même! ».

Ou cette photo sur Twitter de paquets de penne (pâtes) sur des étalages vides, avec le commentaire suivant: « la grande défaite du coronavirus est de n’avoir pas su convaincre les Italiens d’aimer ces penne ».

« Je pense qu’en termes de perception psychologique nous avons vécu le pic de terreur incontrôlée ces derniers jours », relativise M. Zanardi, en ajoutant: « petit à petit, la vie reprendra un peu de normalité. Et l’homme s’habitue. L’exceptionnel deviendra la routine ».